Du 1 mars 1984


Le Marin va-t-en guerre


Silence ! Le vieux gabier dort
La moustache en ressort détendu
Qui remonte au morion descendu
Tout droit sur son rostre de condor

Au merlon, l'échine calée
En grand écart les talons
Plié en deux, i grec barlong
Il se rie bien du sifflet des boulets

S'il levait un coin de son casque
Il verrait expectoré sur l'horizon
Un crachat pourpre de cuisson
Et le corpus venimeux de vos tarasques

Silence ! L'îlien des huniers dort
Son intérêt pour vous a pris du gîte
Il doit encore rêver à sa Marguerite
La Mer aux pieds, perché sur son fort

C'est drôle, ses deux mains reposent
Sur un bout de bois vissé au ventre
Vous pourrez toujours des enfers invoquer le centre
A tout champ éructer les plus belles proses

Je crains qu'il ne soit parti dehors
Sa pique laissée pour le décors
Se souciant peu de votre accord
Silence ! Le lansquenet est mort
!

© Jean-Jacques Rey, 1984